Le Conseil fédéral envisage d’imposer une seconde langue nationale dès le primaire : deux scénarios en débat sur l’harmonisation linguistique

Le Conseil fédéral envisage d’imposer une seconde langue nationale dès le primaire : deux scénarios en débat sur l’harmonisation linguistique

Contexte et cadre institutionnel

Le Conseil fédéral s’inquiète des décisions de certains cantons alémaniques de repousser l’enseignement de la deuxième langue nationale du primaire vers le niveau secondaire, selon un communiqué publié vendredi. Cette orientation pourrait, selon lui, mettre en péril l’harmonisation de l’enseignement et la cohésion nationale.

Cadre légal et objectifs

Le gouvernement a chargé le Département fédéral de l’intérieur (DFI) d’élaborer un projet de loi visant à préciser le rôle des langues nationales dans l’enseignement, en tenant compte des compétences cantonales et des particularités régionales.

Réactions et position de la CDIP

Christophe Darbellay, président de la Conférence des directeurs cantonaux de l’instruction publique (CDIP), juge qu’une intervention fédérale était nécessaire et souligne que la situation est marquée par de nombreuses positions divergentes et un manque de clarté.

Deux variantes à l’étude

Avant consultation, deux scénarios doivent être élaborés. Le premier viserait à inscrire dans la loi sur les langues le système actuel, la solution HarmoS, qui prévoit l’apprentissage de deux langues étrangères à l’école primaire : une langue nationale et l’anglais. Le second scénario fixerait une exigence minimale: l’enseignement d’une deuxième langue nationale serait assuré à la fin du niveau secondaire I, offrant ainsi davantage de marge de manœuvre aux cantons, selon le Conseil fédéral.

Pour Darbellay, cela n’implique pas l’abandon de l’anglais : « l’anglais est aujourd’hui largement utilisé et nécessaire dans de nombreuses situations », rappelle-t-il, ajoutant que dans un pays plurilingue, il est possible d’apprendre à la fois une langue nationale et l’anglais à l’école primaire.

Éventualités d’harmonisation et cadre juridique

Le Conseil fédéral se prépare à une éventuelle difficulté liée à l’harmonisation de l’enseignement des langues, telle que décidée dans le cadre du concordat HarmoS. Une modification de la loi ne serait nécessaire que si les cantons ne maintiennent pas la stratégie nationale des langues, établie en 2004 par la CDIP et intégrée au concordat HarmoS en 2009, ou s’ils parviennent à l’adapter sans affaiblir le rôle des langues nationales.

Imbroglio sur l’enseignement du français dans les cantons alémaniques

Ces derniers mois, plusieurs parlements cantonaux alémaniques ont souhaité repousser l’enseignement du français à l’école secondaire. Appenzell Rhodes-Extérieures a franchi le pas en mars, Zurich le 1er septembre et Saint-Gall mercredi. Le débat autour du « Frühfranzösisch » s’étend aussi à d’autres cantons comme Bâle-Campagne et Thurgovie, et à Schwyz, où les autorités scolaires examinent la question. Même le canton bilingue de Berne est concerné par des motions inspirées du cas zurichois.

Réactions et inquiétudes

La conseillère fédérale Elisabeth Baume-Schneider a exprimé ses inquiétudes face à ces évolutions, qualifiant ces décisions de remise en cause possible du compromis sur les langues et du vivre ensemble. Elle a annoncé envisager une initiative visant à discuter d’une loi contraignante sur les langues nationales et a rappelé que le français, l’allemand, l’italien et le romanche constituent des langues nationales liées au respect de chaque culture et de chaque langue dans le pays.

Elle a indiqué qu’elle pourrait présenter une proposition au Conseil fédéral lors d’une prochaine discussion et a souligné l’importance d’aborder ce sujet dans un cadre légal clair.