Crise politique en France : Paolo Levi compare Paris à l’Italie des années 1990 et esquisse des leçons de compromis
Une crise française qui rappelle l’Italie des années 1990
Paolo Levi, correspondant de l’ANSA à Paris, affirme que la France traverse une crise politique qui rappelle celle observée en Italie au début des années 1990, marquée par une instabilité chronique. Il l’a exprimé lors de l’émission Tout un Monde.
Selon lui, on a l’impression de revenir en arrière à Paris, comme si l’Italie d’il y a vingt ou trente ans refaisait surface. Il note que l’Assemblée nationale est aujourd’hui fracturée en trois blocs presque égaux et que la deuxième économie de la zone euro paraît difficile à gouverner, voire paralysée.
Face à cette impasse, Levi suggère que la France pourrait s’inspirer de l’Italie en identifiant des priorités consensuelles sur lesquelles les forces politiques pourraient converger, de la droite comme de la gauche, pour l’intérêt supérieur du pays.
Le compromis, un enjeu central
Il prend pour exemple la gestion de la pandémie en Italie, lorsque Mario Draghi, ancien président de la Banque centrale européenne, est intervenu comme technicien au-dessus des querelles partisanes et a réussi à rassembler les forces autour d’un cadre commun.
Selon lui, en France le compromis est parfois perçu comme une compromission, voire comme un terme tabou. À l’inverse, il voit dans le compromis une forme de noblesse politique consistant à s’ouvrir à l’autre et à avancer ensemble.
Levi estime que la France a perdu une partie de ce « muscle » politique, c’est-à-dire la capacité à s’offrir une ouverture. Dans l’Hexagone, tout semble parfois être noir ou blanc, et les rapports de force apparaissent comme dichotomiques, ce qui freine la recherche de consensus.
Réformer en France: un chemin jugé révolutionnaire par certains
Pour le journaliste, l’action réformatrice demeure un exercice noble mais le système institutionnel français, centré sur un président doté de pouvoirs importants, freine la culture du compromis. Il rappelle que, dans d’autres démocraties occidentales, le réveil des réformes ne passe pas nécessairement par une rupture violente.
Selon lui, les circonstances actuelles invitent Paris à mûrir politiquement et à rouvrir la voie d’un travail collectif du pouvoir, à l’image de pratiques déployées dans d’autres pays européens.
Il précise toutefois, avec une touche d’ironie, que les grandes réformes françaises ont souvent pris des allures de rupture et que le compromis n’est pas toujours accueilli favorablement par l’opinion publique.
De Rome à Paris: les trajectoires de l’extrême droite
Interrogé sur les conséquences éventuelles d’une arrivée au pouvoir du Rassemblement national, Paolo Levi rappelle l’exemple italien avec Giorgia Meloni, issue d’un parti d’extrême droite mais qui a opéré un virage vers le centre après son élection. Il souligne qu’elle a conservé l’ancrage européen et l’accès au plan de relance, dont l’Italie bénéficie notamment à hauteur d’environ 200 milliards d’euros.
Selon lui, cet exemple montre qu’une victoire de l’extrême droite ne conduit pas nécessairement à une rupture durable avec l’Union européenne et ses partenaires.
Propos recueillis par Julie Rausis. Adaptation web: Miroslav Mares.